Malédiction me rappelle 2 points que d’anciens tests m’ont déjà permis de soulever: le jeu qui fait peur quand on l’explique mais qui en fait est bien (Shadow Hunters), et le jeu dont la mécanique est irréprochable mais qui oublie l’importance des émotions (Mysterium). Ça risque d’être un peu le bordel pour tout exprimer clairement dans ce test…
Malédiction! date de 2008, et c’est un jeu allemand édité par une société canadienne. Étant un jeu allemand, son éditeur a jugé bon de le faire ressembler à un jeu de n’importe quel autre pays sorti dans les années 90. Pour le coup je ne peux pas précisément juger l’ouverture de boîte, celle-ci ayant été remplacée par des assemblages de papier qui prennent moins de place, et le livret de règle étant absent, remplacé par la mémoire du propriétaire (sic).
Par contre les cartes sont présentes. Des cartes moches, avec des illustrations sorties du fond des âges représentant divers personnages tous plus inquiétants les uns que les autres. Attention, je n’ai pas dit « effrayants », mais « inquiétants » : ils ne font pas peur, on se fait juste du souci pour eux, on se demande s’il existe des structures adaptées à les accueillir, tout ça. Toutefois, reconnaissons au matériel une bonne lisibilité. Les cartes sont en outre accompagnées de jetons « Or » en carton, et de jetons « Ingrédient » en bois, aux couleurs bien différenciées (sauf peut-être pour les daltoniens).
Potion.
Chaque joueur se trouve donc avec 12 de ces cartes (tout le monde a les mêmes), chacune présentant un personnage disposant d’un pouvoir principal et d’un autre, disons « de secours ». Au début de chaque manche, chaque joueur choisit secrètement 5 cartes dans ce paquet pour former sa main, puis le 1er joueur pose un personnage de son choix sur la table. A tour de rôle, chaque joueur ayant ce personnage en main devra le jouer mais aura un choix.
Soit le joueur décide de s’attribuer le rôle du personnage, et le joueur qui a précédemment joué la carte perd son tour, soit le joueur décide d’employer le pouvoir de secours du personnage. Il applique immédiatement l’effet, qui est certes moins puissant mais qui ne peut pas être annulé. A la fin du tour de table, le joueur qui dispose encore du rôle choisi applique son pouvoir principal, puis rejoue une carte, etc.
Herbe.
Et tout ça pour quoi? Au centre de la table se trouvent des potions, de plus en plus chères à concocter en termes d’ingrédients. Les joueurs vont donc devoir amasser des ressources pour fabriquer ces potions qui leur apporteront des points en fin de partie. A la fin de ces explications, je n’avais totalement pas envie de jouer à Malédiction!. On m’avait expliqué tellement de moyens de passer ou perdre son tour que je m’imaginais déjà écrire ici à quel point ce titre était pire que les jeux de « pioche-passe » que je déteste tant.
Heureusement, les tours sont tellement rapides que la frustration n’a pas le temps de s’installer, et on réussit (presque) toujours à faire de ses cartes quelque chose qui nous avantage pour aller chercher quelques points de plus. Alors, c’est un bon jeu? Euh… c’est une bonne mécanique. Car si le jeu se révèle assez dynamique et profond pour vous coller à la table, il y manque ce quelque chose qui vous chatouille les émotions et qui vous colle l’expérience ludique à l’esprit.
Au final Malédiction! fait partie de ces titres un peu frustrants à juger, très bons dans leur mécanique mais qui au final ne sont que ça, une mécanique. Ce jeu me rappelle certains horlogers des siècles passés, qui cherchaient à susciter des émotions par la fabrication de leurs automates. Il existe encore aujourd’hui des concepteurs de jeux qui poursuivent cette quête.
MALÉDICTION!
Apparence: 12/20
C’est… austère, voire même caricaturalement teuton. Les teintes sont moches, les images sont moches, mais reconnaissons au titre une lisibilité parfaite.
Simplicité: 16/20
La mécanique se comprend très vite pour laisser la place à la psychologie et la lecture des intentions de chacun.
Fluidité: 15/20
Les actions de chaque joueur sont très rapides, les tours de tables courts, on passe peu de temps entre chaque action.
Immersion: 14/20
Le besoin de suivre les déclarations de chacun tout en élaborant sa stratégie maintient efficacement dans le jeu, on évite tout sentiment d’ennui.
Fun: 11/20
L’autre point « caricature allemande » du titre. C’est prenant, d’accord, mais paradoxalement pas tellement amusant, en fait.
Clarté des règles: 14/20
Pas vu le livret, mais bonne retranscription orale.
Accomplissement personnel: 14/20
Une note un peu par défaut, parce que d’un côté la victoire se construit et se mérite, et d’un autre côté on n’a rien à foutre de son résultat en sortie de table.
NOTE FINALE: 14/20
En écoutant les explications, j’ai voulu mettre 8/20 à ce jeu. Sa mécanique seule vaut facilement 16/20. Finalement ça sera un 14. Parce que le jeu est infiniment plus ouvert et moins frustrant que ce que je m’imaginais, mais aussi parce qu’il ne procure rien au-delà de l’exploitation de sa mécanique qui donne envie de se rappeler du jeu. Un bon système de jeu à tester une fois, pas nécessairement à acheter.